C’est une décision encourageante pour l’e-reputation des professionnels que la justice hollandaise a rendu en juillet dernier. En effet, si depuis 2014, les Européens pouvaient demander à Google et Bing une désindexation de leur nom sur le moteur de recherche pour des liens vers des contenus « inadéquats, non pertinents ou… excessifs », le droit à l’oubli ne s’appliquait pas aux Européen dans l’exercice de leurs fonctions. Mais un chirurgien a semble-t-il opéré une brèche prometteuse dans l’avenir de l’e-reputation des professionnels.
Une décision historique sur le » droit à l’oubli « . Le Guardian, rapporte qu’un chirurgien néerlandais, sanctionné pour négligence médicale, a gagné une action en justice pour obtenir le retrait des résultats d’une recherche Google sur son nom.
Une suspension… suspendue.
L’inscription du médecin au registre des professionnels de la santé a d’abord été suspendue par un comité disciplinaire en raison de mauvais soins postopératoires qu’elle a prodigués à un patient. Mais après un appel, la décision a été remplacée par une « suspension conditionnelle » en vertu de laquelle elle a été autorisée à continuer d’exercer sa profession.
Mais sur Google, les premiers résultats de recherche portant sur les noms et prénoms du médecin pointaient, notamment, vers une liste noire de praticiens… Ce que d’aucuns pourraient comparer à une mort numérique… En dépit de l’adoucissement du comité disciplinaire.

Un lien vers une « liste noire » jugé abusif
Dans un premier temps, Google et l’équivalent de la CNIL hollandaise (l’Autoriteit Persoonsgegegevens), ont d’abord rejeté les tentatives de suppression des liens au motif que le médecin était encore en période probatoire et que les informations étaient toujours pertinentes.
Droit à l’oubli supérieur au droit à l’information
Cependant, dans ce qui s’avère être le premier cas de droit à l’oubli impliquant une négligence médicale de la part d’un médecin, le tribunal de district d’Amsterdam a ensuite jugé que le chirurgien avait « un intérêt à ne pas indiquer que chaque fois qu’une personne entre son nom complet dans le moteur de recherche Google, (presque) immédiatement la mention de son nom apparaît sur la « la liste noire des médecins ». Et cette importance pèse davantage que l’intérêt public pour trouver cette information ».
Un lien jugé accablant
Le juge a déclaré qu’en dépit de la véracité de l’information sur le site Web quant aux manquements du médecin en 2014, le nom péjoratif du site de la liste noire laissait entendre qu’elle n’était pas apte à traiter les gens, ce que les conclusions du comité de discipline n’appuyaient pas.
En outre, le tribunal a rejeté l’allégation de Google selon laquelle la plupart des gens auraient de la difficulté à trouver l’information pertinente dans la « liste noire » de la commission médicale, où les dossiers sont publics. Comme chacun sait, l’association d’un nom avec une liste noire suffit à dégrader une e-reputation.

Le droit à l’oubli respecterait-il le droit à l’erreur ?
Depuis l’arrêt, l’avocat du chirurgien, Maître Van Lynden, a déclaré qu’il avait demandé la radiation de la liste noire de 15 médecins impliqués dans des mesures de disciplines mineures, mais dont la moitié seulement avait été acceptée. « Le comité de discipline n’a pas pour but de punir. Il s’agit de corriger l’erreur du médecin pour qu’il puisse faire le travail la prochaine fois « , a dit M. Van Lynden. Une façon d’associer le droit à l’oubli et le droit à l’erreur et une belle promesse d’amélioration de l’e-reputation des professionnels.
Ainsi, il serait logique que des sanctions provisoires comparables, c’est-à-dire infligée dans le domaine professionnel, bénéficie de la jurisprudence hollandaise. Une radiation provisoire du barreau, une sanction administrative légère ou, par exemple une mise en garde de l’AMF puissent ainsi être concernées…